Parfois je fais le bilan des 5 dernières années vécues et me laisse submerger par les souvenirs & les émotions ...
Je plisse lentement les yeux et je revis certains moments …
Je me souviens de la lumière, de la sècheresse de l’air, de la peur, du discret parfum du maquis, des panoramas envoûtants, de la colère, de la poussière, de la douleur, du vent tortueux, …
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Mardi 29 juillet 2003 12 h 45
Espagne, Piédrahita
Puerto de Peña negra, 1909 m
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Le vent est nord est, chaud mais de faible intensité malgré quelques rafales; Le ciel dégagé, sur lequel rayonne un soleil cru, paraît sans limites. Les parapentes sont dépliés, posés sur le sol, attendant patiemment que leurs propriétaires sortent de leur réflexion afin de faire glisser l’air sur la surface de leur aile.
Quelques bouffes de vent soulèvent la fine poussière marron qui vient voiler les couleurs vives des aéronefs.
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L’encas prévu le matin est rapidement englouti et l’attente contemplative se termine pour l’équipée française alors que 6 espagnols se mettent en l’air. Cela réveille la troupe :Eric, souvent dans les premiers, se positionne sur le décollage;Pierre se prépare méticuleusement, conformément à son caractère calme et posé;Lionel, dit le Cook, s’installe, enthousiaste, alors que je prépare tranquillement la sellette (siège spécifique) que je rattache à ma voile, le tout constituant mon parapente.
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Rendez-vous est donné à Barco de Avila, à 20 kms de là, plein ouest. Barco, facile ! Me dis-je intérieurement, en oubliant bien vite qu’il me fallut plusieurs saisons pour y arriver (débutant, je fréquentais déjà Piédrahita).
A partir de 14 h 15, le signal d’envol est donné. Nous avons eu le temps d’observer les premiers parapentistes évoluer assez librement devant la face nord et repérer des thermiques, masses invisibles d’air chaud qui nous permettent de gagner de l’altitude.
J’embrasse Caro, lui laisse les dernières victuailles ainsi que mon portable en lui disant : « Bon, on se fait un petit vol tranquille jusqu’à Barco et je t’appelle dés qu’on est au sol pour que tu nous « récupère ».
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Ayant la même destination, nous désirons décoller et voler dans la même zone aérienne;Eric et Pierre s’élancent et se mêlent rapidement aux pilotes déjà en vol. Le Cook décolle en douceur puis c’est à mon tour de m’élancer. Nous parvenons à nous maintenir en altitude mais les conditions ne nous permettent pas de rester grouper. En effet les thermiques sont un peu diffus, paraissent mal organisés, et les premiers ne nous permettent pas de prendre réellement du gaz (donc de monter).
Le jeu consiste à repérer les masses d’air ascendantes (thermiques) et à s’y maintenir en tournoyant dedans pour s’élever puis transiter jusqu’aux suivantes.
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N’ayant pas réussi à tirer mon épingle du jeu notamment du fait de conditions faibles et de la proximité d’autres parapentes, dont je n’ose pas trop m’approcher, ne connaissant pas leurs pilotes, je décide de transiter à 2000 m plein ouest.
Je franchis une crête et me retrouve en terrain connu, avec un air peu porteur mais avec de l’espace, donc les coudées franches pour naviguer. Je perds de l’altitude mais j’arrive en approche d’un village, toujours à l’affût du thermique salvateur.
Je bataille et j’ai bien du mal, mais je reste serein :les conditions ne sont pas fortes, je connais ce coin que j’ai déjà survolé à plus basse altitude et je sais qu’on peut se « refaire » (réussir à remonter) à moins de 100 m/sol.
Finalement la persévérance s’avère payante et au bout de 30 minutes, je monte à 2200 m, 300 m au-dessus du plateau qui domine la vallée. Je repère la partie nord-ouest du plateau surplombant 2 combes sous le vent, séparées par une crête qui sera ma dernière étape avant la plaine.
Je m’élance dans cet air que je devine porteur. J’ai vu juste mais les conditions sont plus turbulentes que prévues.